Interrogatoire

 

Je ne dirai rien vous pouvez me faire parler je ne dirai rien je ne sentirai rien à vos brimades
Faites-moi savoir toujours ce que vous me demandez je n’en ai rien à faire
Faites-moi mal avec de l’inox
Je répondrai par un silence de plomb

Je vous livrerai des confiseries des meilleures maisons mais vous n’aurez aucun noms
Vous essayerez de m’attendrir par tous les moyens
J’ai arrêté de fumer

Vous essayerez de me faire sortir de ma sidération j’en ai rien à foutre de vos quolibets
Il me semble même qu’ils portent en eux une espérance un paradoxe une doxa un hypercut du gauche

Vous essayerez de me livrer le Christ une seconde fois
Mais je ne le trahirai qu’une seule fois puisqu’on ne meurt qu’une fois surtout pour de l’argent
Vous m’enfermerez dans des cages aux lions vous m’enfermerez jusqu’à la superstition vous m’enfermerez jusqu’à jusqu’à ce que je perde toute condition sédition

Jusqu’à ce que je devienne bête de cirque à défaut d’être bête du tertiaire d’un prestataire de service d’avocasseries d’affaires et autres étrangetés

J’ai tout avalé

Je me suis moi-même lavé le cerveau par précaution au savon de minuit celui qui ne parle qu’aux érudits
Vous pourrez me harponner avec tous les clous du monde je n’en deviendrai jamais une bête immonde

Après quatre clous on ne fait plus une croix on fait une chaise longue pour dictateur démocrate
Vous pouvez m’enlever les quatre pieds de la chaise ou les trois du tabouret

Je ne céderai rien je suis fait comme ça on m’a formé pour ça on m’a formé pour être une légende vivante bien que je ne sois pas incarné. Il faut croire en sa légende ; il n’y en a pas deux
il faut savoir sur qui compter ; un point de chute sans réalité.

Je ne sais pas si Dieu existe mais je suis protégé par un ange à mes côtés.
Le temps passe voyez-vous vous n’avez toujours rien il est l’heure de passer au temps perdu

À la lutte indéfinie.

 

©Texte de Guillaume Hoogveld

©Peinture de Georges Rouault, Christ, 1937
Cleveland Museum Of Art